La loi n°2025-581, promulguée le 27 juin 2025, est saluée par le Conseil national de l’Ordre des infirmiers comme une avancée historique. Elle consacre un véritable statut législatif à la profession, répondant à des revendications de longue date. Ce texte modifie en profondeur les Codes de la santé publique et de la sécurité sociale, bien que son application concrète dépende désormais de la publication rapide des nombreux décrets et arrêtés attendus.
Les avancées juridiques majeures pour la profession
La loi modifie le régime juridique des 600 000 infirmiers français sur plusieurs points fondamentaux :
1. Autonomie et rôle propre consolidé
- Consultation Infirmière Fondée en Droit : La loi exclut explicitement la consultation infirmière du champ de l’exercice illégal de la médecine (Art. 1er), apportant une sécurité juridique, notamment aux infirmiers libéraux.
- Pouvoir de Prescription Autonome : Pour la première fois, l’infirmier pourra prescrire de manière autonome certains produits de santé et examens, sans prescription médicale préalable. La liste précise sera définie par arrêté ministériel.
- Accès Direct et Rôle Propre : Le rôle propre de l’infirmier est codifié pour inclure explicitement l’orientation du patient, la prévention, l’éducation à la santé et la participation aux soins de premier recours. L’accès direct à l’infirmier sans prescription médicale est expressément prévu, mais les modalités devront être précisées par décret.
2. Reconnaissance de la profession et de la spécialisation
- Science Infirmière Reconnue : La loi inscrit les sciences infirmières dans le Code de la santé publique, alignant la France sur les standards internationaux. Cela ouvre la voie au développement de la recherche, aux financements publics et à la création de postes universitaires dédiés.
- Reconnaissance de Spécialités :
- Le rôle d’Infirmier Coordonnateur (IDEC) est enfin introduit dans le Code de l’action sociale et des familles, avec la nécessité d’un décret pour définir ses missions.
- Une spécialité infirmière autonome est reconnue pour les professionnels de l’Éducation nationale (infirmiers scolaires), pouvant mener à une formation diplômante de niveau master (niveau 7).
- Pratique Avancée Élargie : L’exercice en pratique avancée est élargi aux infirmiers spécialisés (IADE, IBODE, IPDE) dans de nouveaux contextes (santé scolaire, PMI, aide sociale à l’enfance), avec des modalités à préciser par décret.
3. Régime d’exercice et rémunération
- Négociations sur les Rémunérations : La loi impose l’ouverture de négociations conventionnelles pour adapter la rémunération aux nouvelles compétences et à la pénibilité du métier, offrant une base législative pour les discussions à venir avec l’Assurance maladie.
- Reprise d’Activité Encadrée : Une déclaration obligatoire après 3 ans d’interruption d’exercice est instaurée, avec une possible évaluation de compétences pour les interruptions de plus de 6 ans, renforçant la sécurité des soins.
- Indemnités Kilométriques (IK) : Les règles de facturation des IK sont clarifiées par l’imposition d’une définition nationale de l’agglomération, corrigeant des inégalités territoriales pour les infirmiers libéraux.
Prochaine étape : les textes d’application
Malgré cette victoire législative, le Conseil national de l’Ordre insiste sur le fait que la portée de la loi dépendra entièrement de la rapidité et du contenu des textes réglementaires à venir. L’Ordre sera particulièrement vigilant à ce que les décrets et arrêtés (portant notamment sur la liste des produits prescrits, le cadre de la consultation infirmière et la pratique avancée des spécialités) garantissent la sécurité des patients sans restreindre l’ambition de cette réforme.